AG du Réseau CIVAM Poitou-Charentes 2023

Changement climatique, émissions de GES et crédits carbone : on s’y penche dans les CIVAM !

Les groupes adhérents au Réseau CIVAM Poitou-Charentes se sont retrouvés le 4 avril dernier pour leur assemblée générale. Suite à la partie statutaire, nous avons eu le plaisir d’écouter les interventions de Nicolas Métayer (Solagro) et Julien Maulévrier (CIVAM de Charente Limousine), puis d’échanger avec eux.

« Le dérèglement climatique est là » nous rappelle Nicolas Métayer (SOLAGRO : entreprise associative, à l’origine des scénarios AFTERRE 2050, qui réalise des études, des prospectives et de la formation). En France, depuis les années 1980, on constate une hausse moyenne de 0,3 à 0,4°C tous les 10 ans. En Poitou-Charentes, cela se traduit par exemple par la perte de 2 à 3 jours de gel et le gain de 5 à 6 journées chaudes (+ de 25°C) tous les 10 ans. Le lien est à faire avec l’augmentation des émissions de gaz à effet de serre (GES) : +51% à l’échelle mondiale entre 1990 et 2020. Aujourd’hui, 50 Gt d’équivalent CO2 sont émises dans le monde, la France représentant 393 Mt. Les principaux GES sont le dioxyde de carbone (CO2), le méthane (CH4) et le protoxyde d’azote (N2O). Fait peu connu et peu discuté : la vapeur d’eau est aussi un gaz à effet de serre important. Il faut multiplier par 27 la quantité de méthane émise pour avoir un équivalent CO2 et par 273 la quantité de protoxyde d’azote. Le pouvoir réchauffant de la vapeur d’eau n’est pas compté, car elle ne contribue pas au réchauffement climatique à moyen ou long terme, du fait de son temps de résidence dans l’atmosphère (quelques jours).

En France, les transports restent la principale source d’émissions de GES (31%), dont la moitié est émise par les déplacements quotidiens (les paysan.ne.s devant être plutôt bon.ne.s dans ce domaine !). L’agriculture et l’industrie représentent chacune environ 19% des émissions. Attention : ces données ne tiennent pas compte des émissions produites dans d’autres pays, parfois pour nous ! Selon Nicolas Métayer, la France a beaucoup décalé ses émissions dans d’autres pays, avec une très faible réduction globale de ses émissions.

D’où l’intérêt de parler en termes d’empreinte carbone ! Celle de l’alimentation par exemple : les ⅔ des émissions le sont sur les fermes, le reste dans l’industrie agroalimentaire et le transport.

Zoomons donc sur les fermes : les factures d’énergie des exploitations représentent 10% des émissions de l’agriculture, la fermentation entérique (méthane) 36% et les émissions liées aux sols agricoles 26% . Notons qu’1% du flux d’azote importé – toutes formes d’azote confondues : légumineuse, azote chimique, etc. – par hectare cultivé se retrouve sous forme de protoxyde d’azote au moment du processus de nitrification. De même, au cours du processus de dénitrification, certaines bactéries produisent également du protoxyde d’azote.

Comment l’agriculture peut-elle alors participer à l’atténuation du changement climatique ? Nicolas Métayer souligne que l’objectif devrait être de ne pas perdre de carbone, plutôt que de vouloir en stocker (malgré le fait que les politiques publiques tablent sur l’augmentation de nos capacités de stockage). A l’échelle des agriculteur.rice.s, il existe un grand nombre de diagnostics et d’outils pour évaluer les sources d’émissions, les capacités de stockage, etc. et pour tenter de comparer différents systèmes agricoles entre eux. Mais gare aux comparaisons de données non comparables !

Les agriculteur.rice.s du CIVAM de Charente Limousine ont utilisé le logiciel DIATERRE pour comparer leurs émissions de GES. Conclusion : le groupe est plutôt performant (en dessous de la moyenne nationale) avec 5t d’équivalent CO2 émises par hectare. Tous ces échanges ont donné du grain à moudre sur les fameux crédits carbone, dont on entend beaucoup parler en ce moment… Sûrement des thématiques qui vont revenir dans les groupes CIVAM dans les années à venir !

Laure Courgeau, directrice du Réseau CIVAM Poitou-Charentes