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campagnes
vivantes

Une filière Graines pour l’alimentation humaine

Lentille, millet, pois chiche, haricot sec, graine de chanvre… Un groupe de paysans chercheurs de Loire-Atlantique s’est lancé dans la production de protéines végétales à destination de l’alimentation humaine. Une filière qui se structure pour permettre la commercialisation en circuits courts mais également l’approvisionnement de la restauration collective en produits de qualité et locaux !

2014, une poignée d’agriculteur·rice·s et de consommateur.rice.s de Loire-Atlantique prennent connaissance d’Afterres 2050*, scénario prospectif et évolutif qui revisite notre système alimentaire, du champ à l’assiette, aux regards des enjeux de santé publique et des potentialités de nos écosystèmes. Le scénario évoque de multiples thématiques travaillées au Civam : la diversification des cultures et ses bénéfices agronomiques, les consommations d’énergies, la société civile, etc. De là naît l’envie de travailler sur la production de protéines végétales à destination de l’alimentation humaine en vue de rééquilibrer la proportion d’animales et végétales sur les fermes, comme dans l’assiette.

Des pionnier.e.s se lancent dans l’expérimentation de productions de lentille, millet, pois chiche, haricot sec, graine de chanvre… « Ces productions viennent bien sur nos terres, mais il faut apprendre à gérer les étapes post-récolte : triage, séchage, décorticage, stockages… Comme ces graines sont destinées à l’alimentation humaine, la qualité se doit d’être irréprochable ! » Les agriculteur.rice.s se forment et réalisent des visites pour identifier le matériel adéquat à leurs productions et à la taille de leur ferme.

Organiser la commercialisation

La commercialisation pose d’autres questions. Dans le groupe constitué, deux profils : ceux qui ont des circuits courts de commercialisation, et les autres. Pour les premiers, écouler la production est possible en expliquant leur démarche à leurs consommateurs. Pour les autres, tout est à construire ! Pas évident quand ce n’est pas son métier : vers qui se tourner ? Comment ne pas démultiplier les livraisons de petits volumes ?

Tout le monde ne veut ou ne peut pas vendre en direct ! Les circuits longs sont évoqués dans le groupe, pour réduire les temps de travail et écouler de plus gros volumes : « j’aimerais bien produire des lentilles, mais je ne veux pas passer mon temps à les vendre sur les marchés ! ».

L’idée d’approvisionner la restauration collective séduit aussi. Il y a là un acte militant : donner accès à des produits de qualité et locaux à tou.te.s !

En parallèle, la loi EGALIM est promulguée fin 2018. Dans l’objectif de favoriser une alimentation saine et durable pour tous, elle prévoit, entre autre, l’introduction de 50% de produits de qualité d’ici 2022 dans la restauration collective et le test d’un menu végétarien par semaine pendant 2 ans. Les protéines végétales produites au sein du groupe doivent trouver leur place dans ces nouveaux menus.

 

LA MÉCONNAISSANCE DES ACTEURS : UN FREIN À LEVER

« Livrer la restauration collective, c’est souvent compliqué, et ils ne mettent pas le prix ! »  Il y a beaucoup d’acteurs et de modes de fonctionnements différents ! Des questions se posent chez les gérants de restaurants collectifs et les sociétés de restauration. La méconnaissance des attentes et besoins des uns et des autres empêche bien souvent de passer le pas.
Au début de l’année 2019, le groupe a souhaité se familiariser avec ce secteur afin d’être à même de l’expliquer à ses pair.e.s et ainsi démultiplier le nombre de fermes productrices de graines pour l’alimentation humaine. « C’est comme ça que nous pourrons répondre à la demande grandissante de protéines végétales, produites localement et de qualité ! »

La FD CIVAM 44, en partenariat avec le GAB44, a donc étudié l’état de la demande en céréales et légumineuses sur le département. Pas de surprise, elle est là, poussée par la société civile. Mais la structuration de filières locales ne suit pas encore. Exemple sur la lentille : il n’existe pas d’offres structurées sur le territoire. Les acteurs interrogés doivent se fournir au mieux dans le centre de la France, sinon en Europe de l’Est.
Des acteurs de la restauration collective sont sensibles à la démarche de filière territoriale, production biologique, permettant de maintenir emplois et la qualité de nos écosystèmes. Ils sont prêts à payer davantage pour ces services. Depuis 2019, les producteurs de lentilles s’organisent collectivement pour approvisionner la restauration collective à travers « Manger Bio 44 ». Au préalable, il aura fallu se mettre d’accord sur les volumes à écouler, l’homogénéité du produit et sa qualité.

 

Pour aller plus loin
Lire « mieux maîtriser ses débouchés grâce aux filières territoriales »

 

UNE DEMANDE CROISSANTE.

Dans tous les secteurs, restauration collective, épiceries, magasins spécialisés, etc., la demande est croissante ! En l’état actuel, la dizaine de fermes ne permettra pas de répondre à tout le monde.
Le Civam Défi 44 travaille à faire en sorte que l’amont et l’aval se rencontrent. Par exemple en organisant des portes ouvertes destinées aux producteur·rice·s et aux consommateurs. Il s’agit en effet de rassurer des agriculteurs.rice.s quant aux circuits de commercialisation existants et en cours de création sur leur territoire. Parallèlement, l’association a montré aux consommateurs qu’il existe sur le territoire un potentiel de production, si tant est que l’on sécurise les agriculteur.rice.s sur les débouchés.

 

Téléchargez les fiche techniques de la FD Civam 44, constituées à partir du retour d’expériences d’agriculteurs-trices :

 Fiche Culture Lentille
– Fiche Culture Graine de Chanvre 

 

Un article rédigé par Pauline Rio, Civam Défis 44.
Initialement paru dans « La Lettre de l’Agriculture Durable » N°89 

 * En savoir plus sur le scénario Afterres 2050 : cliquez ici 

 

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